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28 septembre 2019

Les orphelins d'Etretat

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La guerre tue. Elle tue des militaires, célibataires, mariés, veufs. Elle tue des pères de famille et fait des orphelins. Tout le monde y pense. Tout le monde le sait. La guerre fait des veuves et des orphelins.

Mais qui pense aux orphelins de mère, dont les pères partent au combat ?

Dès l'annonce de la guerre, des oeuvres caritatives sont créées. C'est le cas de l'association nationale des orphelins de la guerre, créée à Etretat, le 2 août 1914. Et dès la création, un avis est adressé à la capitale

"Tous les enfants des mobilisés, orphelins de mère, conduits à l'Université Populaire, à Paris, seront tout de suite et sans formalités recueillis, hospitalisés, entourés des soins les plus affectueux, par des amis de l'Université Populaire et par des ménagères des faubourgs. Assurance est donnée aux pères que leurs petits, privés de mère, ne seront jamais, quoi qu'il advienne, abandonnés au vice et à la misère."

Le journal "Le Matin" a publié cette appel et, dès huit heures, le 3 août, des pères font la queue devant la porte du Faubourg Saint-Antoine. Ils doivent, dans l'heure, rejoindre la gare qui les mènera à leur régiment et viennent déposer leurs enfants, certains en ont cinq ou six. D'autres ayant dû partir sans attendre, ont laissé leur progéniture à la garde du concierge ou du marchand de vin le plus proche et en ont informé l'Oeuvre, depuis le quai de la gare, pour qu'elle les récupère.

Certains enfants arrivent seuls, avec juste une étiquette accrochée à leurs vêtements.

Quel spectacle terrible et poignant que cela devait être, ces petits enfants laissés entre des mains étrangères par des pères, le coeur déchiré de les abandonner ainsi.

Combien de ces enfants ont revu leur père ?

Entre le 6 et le 20 août 1914, ce sont des centaines d'orphelins de mère qui sont recueillis par l'Oeuvre. Ils sont temporairement hébergés par des sympathisants, des femmes du faubourg Saint-Antoine, pendant que des locaux adaptés sont préparés à Etretat, pour la première colonie des Orphelins de guerre.

Le 22 août, à 9 heures du soir, gare Saint-Lazarre, ce sont 192 orphelins de mère qui sont réunis : départ pour Etretat. Ce sera le premier convoi. La petite ville de moins de 2 000 habitants s'apprete à venir en aide à tous ces enfants.

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L'approche des allemands, aux portes de Paris, créera la panique parmi la population. Les pouvoirs publics partis, il faut évacuer les enfants isolés. Ce sont 600 enfants qui prendront le train pour Etretat.

Mais pour l'heure, nous sommes le 4 septembre. 110 enfants arrivent dans la petite ville, après trente-six heures de voyage éprouvant.

Deux semaines plus tard, 85 orphelins de plus les rejoignent. Et, chaque jour, seuls ou par petits groupes, d'autres enfants arrivent de tout le territoire.

La vie s'organise à la colonie. Il faut occuper les enfants et donner un métier aux plus grands, alors des ateliers  de menuiserie, couture, cordonnerie, etc. sont créés. L'état prend en charge les frais de l'instruction primaire. Les enfants sont bien entourés.

Le 10 octobre, 51 orphelins supplémentaires rejoignent la colonie, et 63, le 29 octobre.

La colonie est une bouée de sauvetage pour ces enfants. Les maires l'ont bien compris. Le 8 novembre, un maire de Paris s'adresse à l'Oeuvre. Cinq enfants, dont le père a été tué au front, se retrouvent seuls dans un hôtel meublé : leur mère vient de mourir. Que faut-il faire pour qu'ils soient recueillis avec les autres ?

Pas de problème, l'oeuvre les prend en charge, comme les 42 orphelins partis le 10 novembre. Le 23 novembre, un nouveau convoi d'orphelins arrive.

Malgré tout, malgré la "publicité" que l'oeuvre fait pour ne laisser personne à l'abandon, le public ne connaît pas forcément leur existence. Un fait divers arrivé rue de Reuilly à Paris, fait prendre conscience qu'il faut faire plus de propagandes pour l'oeuvre. Une femme, dont le mari est tombé au champ d'honneur, la laissant dans la misère, s'est suicidée après avoir tué ses quatre enfants. Cela ne doit plus arriver et de nouvelles annonces sont publiées dans la presse.

De nouveaux convois d'orphelins arrivent à Etretat.

Pour le premier Noël de la guerre, chaque maison de la colonie est décorée d'un sapin et Mme Segond Weber, de la Comédie-Française, et ses amies, envoient 600 pochettes d'étrennes pour les enfants.

Dès janvier 1915, les convois reprennent. Le 26 février 1915, le docteur Fidelin, conseiller général de la Seine-Inférieure, atteste soigner les enfants et le personnel de l'oeuvre et qu'aucune épidémie ne s'est déclarée parmi les sept cents enfants recueillis et distribués dans des familles et qu'il n'y a eu aucun décès ni accident.

En mars, les dix-huit villas occupées à Etretat ne sont plus suffisantes. Il faut trouver d'autres lieux tout en préservant le système mis en place : pas d'internat, mais des placements familiaux. Les enfants sont réunis sous la charge d'une "mère adoptive", souvent une veuve de guerre.

De nouvelles colonies sont créées, sous le même modèle, ailleurs en France. Le 27 mars, une colonie est créée à Saint-Jean-Cap-Ferrat avec quatorze pavillons où arrivent 92 orphelins. Le 15 avril, une pouponnière des Orphelins de guerre voit le jour à Nice, 15 bd Victor Hugo. En mai, création d'une colonie à Juan-les-Pins.

Même si de nouvelles colonies sont ouvertes, Etretat continue d'accueillir de nouveaux convois d'orphelins. Le 3 juin 1915, ils sont 115 à arriver sur place, 119, le 8, accompagnés, cette fois, de veuves de guerre et de mutilés.

D'autres colonies voient le jour : Jouy-en-Josas, Thorenc (sanatorium des Orphelins de guerre) et ce n'est que le début.

La colonie d'Etretat ne suffit plus, une autre est créée à Gonneville, à huit kilomètres.

Cela fait presque un an qu'Etretat accueille les orphelins de mère, dont les pères sont au front. Ils n'ont pas vocation à rester là. Petit à petit, ils sont rapatriés et placés dans leurs départements d'origine.

En juillet 1915, les enfants pour lesquels l'Oeuvre a été créée sont tous repartis. Ils vont être remplacés par d'autres orphelins, des orphelins de guerre, cette fois.

 

 

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Commentaires
S
Bonjour,<br /> <br /> Je suis votre blog depuis un moment et je tiens à vous remercier pour tout ce que v de tous ces moments d'histoire très intéressants que vous nous faîtes decouvrir.<br /> <br /> Que cela a dû être très dur pour ces pères de laisser leurs enfants sachant qu'ils n'avaient plus leur mère. Et ces pauvres enfants déjà sans mère qui voyaient leurs pères partir sans savoir s'ils reviendraient. Bravo à ceux qui ont créé ces colonies et ceux qui se sont occupés des enfants.<br /> <br /> En france on ne se rend pas compte de la chance de vivre dans une période où il n'y as pas de guerre. Mes parents ont vécu la periode de la deuxième guerre mondiale et mon grand père paternel a fait la première guerre mondiale. Il nous racontait des histoires quand j'étais petite toujours sur cette periode. Il était alsacien, il a dû changer son nom car si les allemands le faisaient prisonnier, il aurait été déclaré traitre car les allemands considéraient les alsaciens comme allemands et l'auraient fusillé. D'ailleurs il a bien fait car il l'ont fait prisonnier. Heureusement il a survécu. <br /> <br /> Alors profitons de chaque moment de nos proches car avec l'instabilité du monde actuel nous ne savons pas que ce l'avenir nous réserve.<br /> <br /> Merci encore pour tous moments d'histoire méconnus.<br /> <br /> Sylviane
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