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7 septembre 2018

Nos poilus dans les archives départementales, première partie.

124e RI

Le centenaire de la grande guerre a ouvert l’appétit de nombreux généalogistes, sur les renseignements à obtenir sur leurs poilus. Il y a encore peu de temps, tous ces documents étaient inaccessibles (limite d'incommunicabilité des documents). Aujourd’hui, ce n’est plus le cas.

Mémoire des hommes est une des premières sources utiles, mais ne concerne que les morts, excepté pour les JMO si précieux.

Une très grande majorité de dépôts d’Archives Départementales a mis en ligne les registres matricules de la période, des classes 1887 à 1919.

Le site du CICR nous permet de faire des recherches sur les disparus et prisonniers de guerre.

Mémoire des hommes et Mémorial Gen Web nous permettent de localiser les tombes et les monuments aux morts de nos poilus.

La salle virtuelle des inventaires des Archive Nationales nous permet d’accéder aux livres d’Or des communes.

De nombreux sites personnels, dont certains frisent la perfection, nous permettent de retracer le parcours des régiments, la vie des combattants, et les fluctuations de la ligne de front, depuis la mobilisation jusqu’à la fin de la guerre.

Encore plus de livres ont été écrits sur les régiments, les batailles, les hommes, dont beaucoup de témoignages directs de poilus vous permettent de compléter vos recherches.

Est-ce tout ? Avez-vous fait le tour de tout ce que vous pouviez trouver ?

Je vous entends, je n’ai pas cité les archives militaires de Vincennes. Ok, j’ajoute Vincennes à la liste. Et ?

Comme vous le savez (ou pas), ma spécialité, c’est de rechercher dans les archives départementales. Pour l’instant, la seule source que j’ai citée provenant de ces dépôts d’archives est « les registres matricules ». Mais il y en a d’autres, beaucoup d’autres, et ces sources sont le propos de cet article et des suivants.

Pour la guerre, nous allons, bien évidemment, décortiquer la série R, puisque nous nous attachons aux poilus. Si nous devions nous attacher à d’autres aspects de la guerre, il faudrait chercher ailleurs également, mais, pour aujourd’hui, limitons-nous à la série R.

Qui dit poilus dit militaires mobilisables. Vous connaissez déjà le feuillet matricule qui donne le détail de la « carrière » militaire d’un homme, mais connaissez-vous les deux documents à l’origine de ce feuillet et qui sont accessibles aux AD ? Le recensement cantonal et le conseil de révision.

Ils sont cités dans les feuillets matricules, alors pourquoi ne pas aller voir s’il n’y aurait pas des petits trucs en plus dedans ?

Le premier document, le tableau de recensement, est établi par les maires du canton qui inscrivent les jeunes ayant eu vingt ans dans l’année et qui sont domiciliés officiellement dans leur commune. Cela ne signifie pas que le jeune homme vive dans la commune, mais qu’il y est officiellement domicilié : étant mineur, le garçon, impossible de dire l’homme pour l’instant, est domicilié chez ses parents, ou chez son tuteur légal à défaut de parents. Il peut être également domicilié ailleurs. Dans l’article sur la colonie de Saint-Maurice, il est avéré que les jeunes garçons internés dans cette colonie pénitentiaire, ont été domiciliés dans son canton, alors même que leurs parents étaient vivants et domiciliés ailleurs.

Sur ce tableau de recensement, outre la filiation, une description physique, la profession, la résidence, et les demandes d’exemption, nous trouvons les motifs d’exemption et la réponse du conseil de révision. C’est là aussi que ce trouve la raison pour laquelle vous ne trouvez pas le feuillet matricule du grand-oncle Arsène : il était borgne et n’a donc jamais fait son service militaire. Il n’a jamais été dressé de feuillet matricule pour lui.

A partir de 1901, vous allez trouver également des renseignements qui n’apparaissent pas dans le feuillet matricule. Ces renseignements évoluent avec le temps et le besoin de l’armée sur cette connaissance :

  • L’aptitude à soigner, conduire les chevaux, les vélos, les pigeons, les voitures
  • Les aptitudes physiques : sait nager, est gymnaste
  • Les aptitudes guerrières : sait tirer, sait tuer (pour les boucher), sait cuire (pour les boulangers)
  • Les aptitudes musicales : sait jouer d’un instrument de musique et lequel

Avant 1905, vous avez le numéro de tirage au sort dans le canton (qui est également inscrit sur le feuillet matricule).

Le conseil de révision ne vous apportera pas grand-chose de plus, puisque la décision est reportée sur le tableau de recensement militaire. Mais, sait-on jamais si un gribouillis en marge ne vous donnera pas un détail sur votre poilu, que vous ignorez.

C’est là que l’on apprend que Ernest Henri Cazain, de la classe 1913, a d’abord été ajourné pour faiblesse avant d’avoir été déclaré bon en 1914. Faiblesse ? Il avait la jambe gauche faible pour avoir été écrasée par une roue de voiture, d’où la faiblesse, d’où la cicatrice au front, au-dessus de l’œil gauche, et à la jambe gauche, au-dessus de la cheville. Et cerise sur le gâteau : il sait conduire les chevaux, les soigner, les monter, conduire les voitures et faire du vélo.

On apprend que René Mery, de la même classe, n’a pas eu de feuillet matricule parce qu’il souffrait de paralysie générale infantile. Voilà pourquoi grand-tonton René n’a pas fait la guerre et est probablement mort jeune.

En cas de destruction du registre matricule, vous pouvez obtenir des renseignements par ces deux autres documents.

Que pouvons-nous obtenir de plus ?

Des dates : la date du tirage au sort, la date du tableau de recensement, la date du passage au conseil de révision. Tout cela vous donne une chronologie de la vie de votre poilu.

Des copains : la liste des garçons du même âge partis en même temps que lui. Dedans figure forcément ses copains, copains de classe, à défaut d’être des copains de régiment. Combien sont revenus de la guerre ? Et ceux qui sont tombés, où sont-ils morts ?

Votre vision du poilu change et prend de l’ampleur.

Il n’est plus uniquement votre ancêtre, le matricule XXXXX, parti à la guerre le Y et mort le Z ou revenu le W. Il fait parti d’un groupe, il appartient à un groupe autre que son régiment.

Il a une chronologie de vie avant de partir : avoir vingt ans, l’inscription à la mairie, l’examen du tableau au chef-lieu de canton en janvier-février, le conseil de révision en avril-mai, le départ à l’armée en octobre : toute une année de préparation, d’anticipation, d’angoisses et d’appréhension qui le rend encore plus humain. Cette chronologie ne vaut que pour les classes 1887 à 1913, elle s’accélère brutalement avec la guerre.

N’oublions pas, avant même de partir à l’armée, ou à la guerre, pour certains, l’engagement volontaire, signé de la main du poilu. Ce dernier est allé à la mairie pour signer son engagement volontaire, avec le régiment choisi, et la durée de l’engagement. Cet engagement est indiqué sur son feuillet matricule, mais avoir le document en main !!!

 

Ce ne sont que des petits renseignements que l’histoire a semé sur ces documents, mais ils sont grands humainement parlant.

La suite demain…

PS : le tableau de recensement cantonal vient du tableau de recensement communal. Si le premier est détruit aux archives, le second est peut-être encore intact dans les archives communales ou le dépôt des communes aux archives. C’est le cas dans le Loiret.

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