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2 juin 2017

Challenge AZ Généalogie - B comme le crime d'Etienne Georges de Beauvilliers

Boisvilliers

Non, le B n'est pas pour Beauvilliers mais pour la série B - 15 BV 86 plus exactement des archives départementales du Loir-et-Cher.

Etienne Georges de Boisvillier, écuyer, sieur de la Roberderie, âgé de vingt-sept ans, vit au bourg et paroisse de Gy, chez sa mère, Marie Anne Ferré, veuve de Boisvillier.

Le matin du vendredi 27 août 1751, il quitte le bourg de Gy pour se rendre à Romorantin, pour deux affaires de justice de sa mère. Comme à son habitude, il descend à l’auberge des Trois poissons, où il laisse son cheval, et se rend à l’auberge de Saint François, où il a l’habitude de manger et de boire. D’ailleurs, au moment où il passe dans la rue, la fille de l’aubergiste l’interpelle et il entre dans la chambre basse, attenante à la cuisine. Là, il s’attable avec Joseph Germain, le fils d’Olivier Germain, l’aubergiste, et boit et mange avec lui.

Dans la pièce, à une autre table, mangent Olivier Germain, le père, Jean Poitevin, marchand cordonnier demeurant à l'Isle Martin, et Louis Joseph de Boisvilliers, écuyer sieur de Laubraye, vingt-sept ans, cousin d’Etienne Georges. Ces trois derniers s’en vont et Etienne Georges reste seul avec Joseph, jusqu’à ce que, une heure plus tard, ils reviennent s'assoir à leur table. Jean Poitevin s’en va, Jacques Tricard fils, marchand épicier demeurant en la grande rue, arrive et s’assied avec eux.

A partir de là, les choses dérapent. Il existe un contentieux entre Etienne Georges et son cousin, Louis Joseph. Ce dernier aurait tué le chien du premier. Lequel aurait déclaré vouloir se venger à plusieurs reprises et aurait même tiré au pistolet sur l’habitation de l’autre. Pas vraiment l’entente cordiale entre les cousins. Ajoutons à cela l’excès de boisson et arrive le moment où les noms d’oiseau volent dans la pièce.

Etienne Georges se lève de sa chaise, s’approche de la table où se trouve son cousin et la dispute s’engage. Etienne Georges reproche à Louis Joseph de mener une vie scandaleuse. Il a installé chez lui une « gueuse de servante » dont il a deux enfants vivants. L’autre réplique en le traitant de Jean Foutre et autres noms d’oiseau. Insulté, Etienne Georges lui en demande raison et lui accorde deux heures pour aller chercher une épée. Il sort de la pièce mais revient aussitôt et s’approche de la table l'épée à la main.

Là, les témoignages divergent. Les personnes présentes dans la pièce affirment qu’Etienne Georges s’est approché de son cousin et lui a donné trois coups d’épée, deux dans le bras et un dans le côté droit. Etienne Georges affirme que son cousin l’a menacé de son couteau et … qu’il ne se souvient pas de l’avoir frappé avec son épée. Peut-être son cousin s’est-il jeté sur l’épée tout seul (à trois reprises !!!).

Etienne Georges s’enfuit aussitôt, retourne à l’auberge des Trois poissons, alors que l’on crie après lui dans la rue, demande à boire à Marie Couturier, femme de Silvain Thierry, qui tient l’auberge, boit d’un coup son verre et part à l’écurie. Il tente de seller son cheval, renonce à lui mettre la bride et s'esquive par derrière, dans la campagne.

Appelés sur les lieux, deux chirurgiens, Jean Mestivier et Jacques Debrinay, examinent le blessé et remarquent plusieurs blessures faites par un instrument tranchant et pointu. Ces blessures sont situées, l'une à la partie supérieure et interne de l'avant-bras, une autre à la partie inférieure et externe du bras, la troisième située immédiatement au-dessous de la mamelle droite à un travers de doigt du mamelon, pénétrant dans la poitrine avec un épanchement de sang considérable, ce qui leur fait conclure que le lobe du poumon droit est blessé. Leur diagnostic est pessimiste et indique un danger évident de perdre la vie. Leur traitement est une saignée (comme s'il n'avait pas perdu assez de sang) et une diète.

Le 28 août, les témoins sont convoqués par le lieutenant criminel, en son hôtel, rue de l’écu, à neuf heures du matin. Il s’agit d’Olivier Germain, marchand cabaretier, tenant l’auberge de Saint François, son fils, Joseph, qui vit avec lui, Jacques Tricard fils, marchand épicier demeurant en la grande rue, Jean Poitevin le plus jeune, marchand cordonnier demeurant à l'Isle Martin, Louis Laurenceau, demeurant chez la veuve Laurenceau, sa mère, près l'étape de la ville, Nicolas Droulin, maître Drapier demeurant faubourg de Blois, Silvain Thierry, marchand cabaretier demeurant à l'auberge des Trois Poissons, faubourg de Blois, Marie Couturier, femme du nommé Thierry.

Suite à leurs témoignages, les 28 et 29 août, le lieutenant criminel dresse une information contre l’accusé et un décret de prise de corps est dressé contre lui. Le 9 septembre, une perquisition est effectuée par Jean Boizeau, sergent royal, à Gy, au domicile de la dame Ferré, veuve de Boisvilliers et du sieur Etienne de Boisvilliers, écuyer, sieur de la Roberderie, son fils. A son arrivée, un domestique lui dit que son maître est absent depuis environ une quinzaine de jours sans savoir où il est. Le domestique refuse de signer sa déclaration. La fouille de la maison ne donne rien, l'oiseau s'est envolé.

Le 18 septembre 1751, à huit heures du matin, le lieutenant civil et criminel du bailliage apprend le décès de Louis Joseph de Boisvilliers, dans l'auberge où il a été blessé. Il s'y rend et trouve le cadavre dans le même lit où il l'avait laissé le 27 août. Deux nouveaux maîtres chirurgiens sont nommés pour examiner, cette fois, un cadavre. Il s'agit de Jean Vergnault, maître chirurgien et lieutenant de monsieur le premier chirurgien du roi, et de François Touvé, aussi maître chirurgien et greffier de monsieur le premier chirurgien du roi. Ils remarquent une plaie fraîchement cicatrisée à la partie antérieure de la poitrine, à un travers de doigt au-dessous du mamelon droit. Pour connaître la profondeur de la plaie, ils lui ouvrent la poitrine et notent que le poumon a été touché, un peu en-dessous de la partie moyenne du lobe droit ce qui a provoqué un épanchement considérable dans le côté droit de la poitrine et qui n'a pas été évacué par l'opération qu'il a subie. La blessure a été faite par un objet tranchant et pointu comme une épée, un couteau ou toute autre chose semblable.  C'est la cause de la mort.

Le 11 octobre 1751, Jean Boizeau, sergent royal et François Boiron, tambour de la ville de Romorantin, se rendent à Gy, à trois grandes lieues de Romorantin, dans la maison de la dame Ferré, veuve de Boisvilliers et mère d'Etienne de Boisvillier, puis sur la place du bourg de Gy, à la place des auvents et au carroy du mail de Romorantin, ainsi qu'à la principale porte et entrée de l'auditoire des bailliages de Romorantin et Millançay. A chacun de ces lieux, ils battent tambour, exigeant qu'Etienne de Boisvillier comparaisse sous huitaine, à neuf heures du matin, devant le lieutenant criminel, en la chambre des bailliages pour être interrogé. S'il ne comparait pas, il sera contre lui donné défaut et contumace.

Le 24 décembre 1751, les témoins sont de nouveau convoqués, à une heure de l'après-midi, devant le lieutenant Criminel du bailliage. Le 26 décembre 1751, de nouveaux témoins sont convoqués, qui ont croisé la route d'Etienne ce jour-là, ou ont été témoins des altercations entre lui et son cousin : Georges Bonnet père, paveur demeurant près de la porte Lambin, à Romorantin, son fils Georges, paveur, demeurant avec lui, messire Michel Savare écuyer, seigneur du Moulin, demeurant en son château du Moulin à Lassay, messire Pierre Gallus, sieur des places, demeurant en sa maison des places à Lassay, au sieur Gallus Desplaces, fils, demeurant avec le sieur Desplaces, son père, en leur maison Desplaces, à Lassay, Pierre Simon, métayer de la métairie des Places, y demeurant paroisse de Lassay. Ils doivent comparaître le lendemain à neuf heures du matin.

Le 15 février 1752, après les témoignages recueillis contre lui, le lieutenant criminel requière pour le roi et son altesse sérénissime monseigneur le duc d'Orléans, que la contumace soit déclarée bien instruite contre Etienne de Boisvilliers, sieur de la Roberderie, accusé , qu'il soit déclaré dûment atteint et convaincu d'avoir assassiné la personne de Louis Joseph de Boisvilliers, écuyer, sieur de Laubraye, son cousin germain, qu'il soit condamné à avoir la tête tranchée sur un échafaud qui sera dressé en la place du carroy du mail de la ville, tous ses biens acquis et confisqués à qui il appartiendra et sur chacun d'eux sera pris la somme de cent livres d'amende envers le roi et SAS monseigneur le duc d'Orléans, si la confiscation n’est pas à leur profit. Mais l’accusé est absent et c’est son effigie en un tableau qui sera attachée par l'exécuteur de la haute justice à une potence.

Le 18 mars 1752, le greffier du bailliage, Silvain Lemaire, se transporte en l'hôtel et domicile de monsieur le procureur du roi auxdits bailliages, pour lui faire lecture de la sentence. Le procureur est appelant et il en appelle à minima.

Le 29 juillet 1754, Nicolas Delaunay, Jean Chayer, Etienne Archambault, Pierre Hubert et Jean Courcelle, sous brigadier et cavaliers de la maréchaussée générale d'Orléans à la résidence de Romorantin, informés de la présence d'Etienne de Boisvilliers, chez sa mère, à Gy, s'y rendent et l'arrêtent. Il est fouillé, on ne trouve sur lui qu'un couteau à manche de corne de cerf appartenant à sa mère et qui est rendu à cette dernière. Il est immédiatement mis sur un cheval et conduit à la prison de Romorantin, où il est remis à la garde de François Chenay, concierge de la prison. Il est interrogé et confronté aux témoins.

Le 26 août 1754, le réquisitoire pour le roi est qu'Etienne Georges de Boisvilliers est convaincu d’avoir assassiné son cousin, Louis Joseph de Boisvilliers, pour réparation de quoi il est condamné à avoir la tête tranchée sur un échafaud qu,i pour cet effet, sera dressé en la place publique du carroy du mail de la ville et tous ses biens situés en pays de confiscation sont déclarés acquis et confisqués au profit de qui il appartiendra, sur eux sera préalablement pris la somme de deux cent livres d’amende envers son altesse sérénissime le duc d’Orléans.

Le 4 octobre 1754, l'accusé est interrogé sur la sellette. Ce n'est pas une torture. Il s'agit juste d'assoir l'accusé sur un petit siège en bois très bas, en situation inconfortable d'infériorité manifeste et d'humiliation également. Etienne Georges n'avoue rien et persiste dans ses déclarations précédentes.

Le 8 octobre, le procureur du roi en appelle une deuxième fois, à minima (appel lorsque le procureur estime que la peine n'est pas assez lourde !!!)

J’ignore la suite donnée à ce procès car je n’ai trouvé ni compte rendu d’exécution, ni acte de sépulture (logique s’il a été exécuté), ni trace de vie d’Etienne Georges après cette date.

 

 

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Commentaires
M
Bravo ! C'est vraiment très bien raconté !
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