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22 juin 2021

Histoires d'argent : votez, votons, votent qui peut

Pour le Généathème du mois de juin "histoire d'argent", j'ai choisi de parler d'un sujet d'actualité : les élections. Quel rapport me direz-vous ?

Avant que Napoléon III n'arrive au pouvoir, pour avoir le droit de voter, il fallait payer des impôts, et même alors, vous n'étiez pas certain de voter, car il fallait payer un certain niveau d'impôt, le Cens. C'était le vote censitaire.

Nul doute qu'à l'époque, bien des hommes (qui étaient les seuls à avoir le droit de voter), aurait été aux urnes pour s'exprimer s'ils en avaient eu le droit. Aujourd'hui, tout le monde en a le droit (à condition d'avoir plus de dix-huit ans) mais peu le font.

Allez y comprendre quelque chose. Je crois que notre stade de civilisation est tellement pourri-gâté qu'il n'apprécie plus ce qu'il a et qu'il risque fort de le regretter si un jour cela disparaît.

Mais revenons à nos histoires de gros sous.

Pour avoir le droit de voter, il fallait avoir plus de vingt-et-un ans, et payer un total d'impôts directs supérieurs au cens. Ce sens était fixé à deux cents francs pour être électeur et cinq cents francs pour être éligible (et plus de vingt-cinq ans également pour le second cas) à compter de 1831.

Avant, c’était trois cents francs pour être électeur et mille pour être éligible.

Même avec le droit de vote, vous ne pouviez pas forcément être éligible.

Cela faisait une sacrée pyramide républicaine, avec une base pauvre et muette, un premier étage restreint, aisé et impliqué et un dernier étage "riche" maîtrisant le pouvoir.

Enfin, maîtrisant le pouvoir est un bien grand mot, car, au niveau des communes, c'était le préfet et donc le gouvernement en place, qui avait le dernier mot et le pouvoir d'accepter ou refuser les décisions des conseils municipaux.

Mais revenons à notre liste d'électeur. Pour y figurer, il fallait donc avoir plus de vingt-et-un ans et payer au moins deux cents francs de cens. Ce qui posait un problème de taille, dans les petites communes : peu payait autant d'impôts.

Pour que le scrutin soit valable, il fallait que les électeurs, dans les communes de moins de mille habitants, représentent au moins 10% de la population.

Comment faire lorsque seuls trois ou quatre habitants rentraient dans les critères ?

Les 10% les plus imposés, sans plus tenir compte du cent, étaient inscrits sur la liste d'électeurs.

Cette liste d'électeur se scindait en plusieurs parties. La première, comportaient les électeurs censitaires (même s’ils ne payaient pas jusqu’au cens), représentant au moins 10% de la population.

Pour une commune comme Authon, dans le Loir-et-Cher, qui comportait, en 1846, 935 habitants, la première partie était constituée de 96 électeurs censitaires. Sur les 96, seuls dix atteignaient le cent.

Le plus aisé, Alfred, comte de Montesquard, officier de la légion d'honneur, payait 3730.64 francs d'impôts.

Tout en bas de la liste, exæquo avec 30.46 francs d'impôts payés, François Chabert, journalier, et Jacques Desvaux père, propriétaire, clôturaient la liste des électeurs.

Au-dessus de mille habitants, un savant calcul rajoutait des hommes à la liste : cinq par cent jusqu’à cinq mille, quatre par cent jusqu’à quinze mille, etc.

Et il existait tout un tas d’autres règles : il ne devait pas y avoir moins de trente électeurs domiciliés dans la commune avant de voir apparaître les non-domiciliés, sauf si le nombre de citoyens payant une contribution personnelle n’est pas suffisant, etc..

Pour les élus, âgés d’au moins vingt-cinq ans, et les communes de moins de cinq cents habitants, il ne pouvait y avoir, au conseil municipal, en même temps, le père et les fils, ou les frères.

Si vous voulez déguster tranquillement cette loi, celle du 21 mars 1831, allez donc faire un tour sur Gallica.

Elections

Chaque année, le maire et le percepteur, dressaient la liste de tous les contribuables de la commune, jouissant de leurs droits civiques et payant suffisamment d’impôts. Sur cette liste, où les électeurs étaient inscrits dans l’ordre décroissant de leur imposition, figurait justement la somme qu’ils payaient. Et cette liste était affichée dans la commune.

J’imagine une telle démarche aujourd’hui !!!

Heureusement, les temps changent et tous les électeurs sont sur un pied d’égalité, quelque soit leurs revenus. Evidemment, ce serait parfait s’ils usaient tous de leur droit de voter, mais c’est un autre débat.

Revenons à notre liste.

La première partie comprenait les électeurs censitaires, inscrits aux rôles des contributions directes de la commune. Ce qui ne veut pas dire qu’ils y vivaient.

La seconde partie comprenait les électeurs adjoints qualifiés. Il n’y en avait pas dans toutes les communes. Pour être électeur adjoint qualifié, il fallait avoir plus de vingt-et-un ans, avoir son domicile réel dans la commune, jouir de ses droits civiques et civils et exercer le bon métier (membres des chambres de commerce, des conseils de manufactures, des conseils de prud’homme, des commissions administratives des collèges, des hospices, des bureaux de bienfaisance, officiers de la garde nationale, membres et correspondants de l’institut, des sociétés savantes autorisées par la loi, docteur de droit, de médecine, de sciences, de lettres, avocats, avoués, notaires, anciens fonctionnaires, employés des administrations civiles et militaires, élèves de l’école polytechnique, officiers de terre et de mer jouissant d’une pension de retraite).

La troisième partie de la liste d’électeurs, appelés électeurs complémentaires, comprenait des citoyens de plus de vingt-et-un ans, inscrits pour compléter les trente domiciliés.

C’est le cas de la commune d’Ambloy, en 1846, dont la population s’élevait royalement à 273 habitants. Le nombre d’électeurs censitaires devait s’élever à 27. Sur la première partie, ils étaient trente inscrits mais sept vivaient dans une autre commune. Il n’y avait pas d’inscrits sur la seconde partie, mais, sur la troisième, ils étaient neuf. Par un drôle de tour de passe-passe, le total ne fait plus état que de 27 électeurs censitaires et 9 électeurs complémentaires.

A Saint-Amand, toujours pour la même année, il y a 52 électeurs censitaires et 1 électeurs adjoint qualifié : Jacques André Vassault, cinquante-huit ans, officier de terre à la retraite, qui a justifié de son titre.

Voilà comment, grâce à l’argent, nos ancêtres pouvaient ou non voter.

Si les archives fiscales sont rarement parvenues jusqu’à nous, aujourd’hui encore, les feuilles d’impôt ne sont pas conservées très longtemps, les listes électorales, elles, ont été en grande partie préservées.

Grâce à elles, vous pouvez savoir si vos ancêtres votaient, avaient le droit de voter, mais également, combien d’impôt ils devaient payer.

On peut dire, qu'à l'époque, les élections avaient du Cens !!!

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