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25 août 2020

25 août 1870 - le massacre des mobiles de la Marne

Le 24 août, la cavalerie prussienne arrive sur Vitry-le-François. Le capitaine commandant la place, jugeant la résistance impossible, décide de quitter la place avec ses hommes pour rejoindre Passavant. Les canons des remparts sont encloués et jetés dans les fossés et, vers dix heures du soir, les troupes quittent la ville. Il s’agit d’un bataillon de mobiles, formé par des jeunes hommes des arrondissements de Vitry et de Sainte-Menehould. A marche forcée, ils arrivent à Vanault-les-Dames, au bout de quatorze heures. Ils sont épuisés, n’ont ni mangé, ni bu depuis la veille.

Des éclaireurs prussiens les talonnent, les harcellent, réussissant même à capturer le commandant.

La colonne de mobile réussit à atteindre la ferme de la Basse quand les obus prussiens commencent à pleuvoir. Les pauvres gamins n’ont qu’une dizaine de cartouches chacun, et pourtant, ils vont se battre et résister malgré les charges des prussiens. L’un d’eux réussit même à abattre le chef des Uhlans, le colonel Von Friesen, avant d’être lui-même tué. Les prussiens sont furieux de la mort de leur chef. Cela explique peut-être leur barbarie dans les heures qui vont suivre.

Passavant

Alors qu’ils n’ont plus de munitions, les français se rendent. Ce n’est pas du goût des uhlans du 15e qui les chargent quand même. Ils font prisonnier les survivants, menace de les tuer, si ceux qui combattent encore ne se rendent pas. Le lieutenant Jaunaux, qui dirige les derniers combattants finit par céder sous la menace. Il est blessé, comme beaucoup de ses hommes.

Une colonne de prisonniers est formée, à Sivry-sur-Ante. Les quelques échappés sont attrapés par les uhlans qui les ramènent, morts ou vivants, traînés derrières les chevaux lancés au galop.

Les uniformes minimalistes des mobiles les font prendre pour des francs-tireurs, et les prussiens sont prêts à les exécuter immédiatement quand le grand-duc Guillaume de Mecklembourg arrive avec son état-major. La lecture des livrets militaires confirme qu’il s’agit bien de soldats, ils sont « protégés » par la convention de Genève.

Les plus grièvement blessés sont laissés sur place. 850 hommes forment la colonne de prisonniers qui, après deux heures de marche, arrive aux premières maisons de Passavant. Que s’est-il passé alors ?

Un prisonnier assoiffé aurait quitté la colonne pour s’abreuver à la rivière. Les prussiens, croyant à une tentative d’évasion lui tire dessus. Et c’est la confusion et le point de départ d’une sauvagerie sans nom, qui verra l’assassinat de 49 prisonniers de guerre.

Les uhlans du 15e se précipitent sur les mobiles désarmés et les massacrent à coup de sabre et de lance. Trente-deux sont tués sur place, quatre-vingt-douze sont mutilés, certains ayant reçu jusqu’à une douzaine de coup de lance et de sabre.

Au total, cent mobiles prisonniers de guerre désarmés sont blessés. La moitié d’entre eux ne peut repartir avec la colonne de prisonnier et est laissée là. Le docteur Henri Osiecki, de Sainte-Menehould, informé des évènements, se rend à Passavant pour y chercher les blessés. Certains sont confiés à l’ambulance de Châlons, d’autres sont soignés à Sainte-Menehould, dans son service. Très vite, ils sont évacués pour qu’ils ne retombent pas entre les mains des prussiens.

  • Dominique Rizeau, des Grandes-Côtes, est amputé à châlons du bras.
  • Emile Rougeot, de Servon, a reçu une balle dans la face. Il en meurt quelques temps après.
  • Léon Delorme, de Vitry, a reçu quatre coups de sabre à la tête, des coups de lance à l’épaule et à la fesse gauche. Malgré une trépanation, il meurt des suites de ses blessures.
  • Emile Lecoq, d’Alliancelles, a reçu des coups de sabre à la tête. Il survivra malgré l’ablation d’une portion du pariétal et du temporal droit.
  • Eugène Verdet, de Saint-Ouen, a le front ouvert par une coup de sabre. Malgré une trépanation, il décède des suites d’une encéphalite.
  • Louis Amédée Messager a reçu un coup de sabre au côté gauche et cinq coups de lance. Adolphe Madaye, de Vienne-le-Château, a reçu 8 coups de lance sur tout le corps.

Et la liste est sans fin. Ceux qui mourront de leurs blessures ne figurent pas dans la liste des victimes de Passavant, pourtant, ils devraient.

Ne l’oublions pas, tous ces mobiles sont du pays. La nouvelle du massacre est vite parvenue aux familles, sans nouvelle de leurs proches. Dix-sept corps ont été rassemblés au cimetière après le massacre. Le maire a alors envoyé ses administrés fouiller la campagne à la recherche de blessés ou de mort. Trente-deux corps sont ramenés au village. Ils sont inhumés dans le cimetière de Passavant, sans être identifiés. Les corps ont été dépouillés. L’instituteur ne peut identifier que deux hommes, Brouillon, boulanger à Sermaize, et Pierre Théogène, de Bettancourt-la-Longue.

A la demande des familles, les pauvres mobiles sont exhumés. Spectacle horrible que ces corps enterrés sans cercueil, présentant leurs blessures mortelles, et en état de putréfaction. Cinq d’entre eux vont être reconnus par leurs familles : Bourlier, Coyon, Sauteur, Larcenet et Lemaire.

Les corps sont réinhumés dans la fosse, pied à pied, sur deux lignes.

Ils étaient 1 500 au départ. Heureusement seuls 800 seront tués, blessés ou faits prisonniers. Les autres ont réussi à s’enfuir. Beaucoup d’entre eux, n’osant pas rentrer chez eux, resteront cachés dans les bois et seront nourris par la population.

Les prisonniers, eux, seront envoyés à Glogau. Mais avant cela, leur calvaire va être long. Ils partent, à pied, sans nourriture et sans eau, les prussiens interdisant aux villageois de les aider, et sans avoir été soigné. Il faudra attendre leur arrivée à Pont-à-Mousson, pour que, sur les sollicitations du commandant Duval, prisonnier également, ils aient enfin le droit de manger et d’être soignés. Nous sommes le 28 août. Arrivés à Remilly, ils sont pris en charge par une ambulance de la société de secours aux blessés, qui les soigne et leur donne à manger. Le lendemain, c’est le départ pour l’Allemagne et sept longs mois de captivité. Tous n’en reviendront pas.

Liste des soldats français prisonniers assassinés le 25 août 1870 à Passavant

  • Armée active : brigadier Pézin, Tarrut
  • Infanterie de ligne : inconnu
  • Garde mobile de la Marne, batterie d’artillerie : Appert, Bourgouin, Bourlier, Buat, Delorme, Haller, Landréat, Picart, Jeannet, Payard, Prieux, Renard, Boude, Cappé,
  • Garde nationale mobile 4e bataillon de la Marne, 1ère compagnie : Brouillon, Coyon, Giret, 2e compagnie : Aubry, Binet, Gallois, Gouilly, Fralon, Martin, 3e compagnie : Namain, 4e compagnie, Baudet, Bouquet, Boutillet, Cardot, Francart, Haimart A., Haimard J.P., Pérard, 5e compagnie Larcenet, Pierre, 6e compagnie : Bizeaux, Fagnant, 7e compagnie : Gallois, Lemaire, Valentin, 8e compagnie : Verdet, Donat, Garnier, Frerson, Pierre Jean, Sauteur

 

Trente-trois d’entre eux sont inhumés au cimetière de Passavant. Leur massacre sera longtemps commémoré, dans le pays.

Passavant-2

 

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