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7 septembre 2019

Une autre dimension de la guerre

Charge-baionnette

Les archives de la grande guerre nous apportent une masse de renseignements qui font bien défaut aux guerres précédentes. Pourtant, en faire un usage intensif nous montre les limites des feuillets matricules, fiches MPF et autres documents.

Ce sont des documents administratifs. Comment leur reprocher de se contenter de relater les évènements nécessaires à l'administration.

Untel a été blessé tel jour à tel endroit. Parfois, quelques détails sur la blessure, uniquement pour en attester la gravité à des fins de réforme et de pension.

Cela nous donne une vision en deux dimensions des évènements. Les hommes partent au front, sont touchés par l'ennemi, tombent, sont évacués, retournent au front, etc.

Il faut lire les écrits de ces soldats pour avoir un léger aperçu d'une troisième dimension : le temps qu'il fait (chaleur écrasante, boue envahissante, pluie incessante), la fatigue, la peur peut-être aussi, en filigrane.

Qui peut savoir, en lisant le feuillet matricule de Georges Marcelin Lory, du 113e, qu'il a été blessé dans la Meuse, à l'épaule et au pied, par une mitrailleuse juchée au sommet d'un clocher ? Que, malgré ses blessures, il a réussi à s'échapper en frappant trois allemands avec sa baïonnette.

Qui peut savoir que René Chédé, caporal fourrier au 153e, a reçu une balle dans le dos, à Morrhange. La balle a glissé sur le cuir de sa bretelle, et s'est logée au bas du dos. Qu'il est resté caché toute la journée, dans des gerbes d'avoine, et qu'il a rejoint, la nuit tombée, un village. Qu'il a du de nouveau s'enfuir, pour ne pas être fait prisonnier, en suivant le fossé de la route en évitant les balles, rejoignant ainsi les lignes française pour y être soigné dans une ambulance à Saint-Nicolas-du-Port, près de Nancy, puis à l'hôpital d'Argenton-sur-Creuse puis Béziers.

Que André Auville, du 156e, a été blessé d'une balle au bras droit, à Château-Salins, lors d'une charge à la baïonnette.

Que Félicien Louis Auguste Chauvin, canonnier au 30e d'artillerie, a été blessé par un éclat de l'obus tombé sur sa batterie au moment du repas, tuant ou blessant plusieurs de ses camarades.

Que Abel Proust, clairon au 42e bataillon de chasseurs à pieds, a été blessé à Neuvireul, à la cuisse et à l'épaule gauche. Qu'il a fait le mort, sur le champ de bataille, pour échapper à l'ennemi et qu'il a regagné seul, les lignes française, pendant la nuit, malgré ses blessures.

Que Désiré Armand Peschard, soldat au 31e, blessé après trois jours de combat, à la frontière du Luxembourg, par une balle de schrapnell qui lui a traversé la cuisse droite, a vu une autre s'aplatir dans sa poche, sur son couteau à ouvrir les boîtes de conserves et une troisième traverser les pans de sa capote.

Que Camille Blin, brigadier au 8e chasseurs, a été blessé au pied gauche par son cheval, tué sous lui à Brieulles-sur-Meuses, en faisant une reconnaissance.

Que Alexandre Diguet, soldat réserviste au 368e, blessé par une balle qui lui a traversé la cuisse droite, s'est traîné jusqu'à une pièce d'avoine et s'y est caché jusqu'à la nuit. Il a été secouru par des braves gens qui l'ont conduit dans une maison où un autre soldat, blessé au cou, l'a rejoint peu après. Le village est pris par les allemands qui veulent les emmener prisonnier, mais Alexandre, dans l'impossibilité de marcher, est abandonné sur place. Les français reprenant le village, il est évacué sur l'hôpital de Grenoble, échappant de peu à la captivité.

Que Fernand Gaston Bourdain, soldat réserviste au 113e, a perdu sa jambe en mettant à l'abri, dans un fossé, un de ses camarades blessé.

Que Paul Guillot, soldat au 3e zouave, a reçu deux balles dans le bras droit et un éclat d'obus dans la jambe gauche, en chargeant l'ennemi à la baïonnette, pendant la bataille de la Marne.

Que Gaston Moreau, professeur de gymnastique dans le civil, sous-lieutenant au 113e, a reçu une balle au mollet droit, au moment où est donné l'ordre de repli, en franchissant un talus. Poursuivi par le feu de l'ennemi, il a marché sur une seule jambe pendant trois quart d'heure avant de tomber sur des brancardiers. Ces derniers l'ont transporté dans une brouette en évitant les lignes allemandes.

Et des histoires comme celles-là, il y en a beaucoup....... et soudain, la guerre prend une autre dimension, un autre aspect, celui du courage, de la volonté et parfois de la chance.

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